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Les derniers numéros

Comment définir l'autorité ?

« La chance pour un ordre d’obtenir docilité »

Max Weber, sociologue du tournant du XXe siècle, développe une vaste théorie de la domination. Un modèle de domination légitime repose sur l’autorité, celle-ci permettant de faire accepter le commandement du chef comme valide par les dominés. C’est sur le fondement de cette autorité que l’État détient le monopole de la violence légitime. Selon Weber, cette logique de commandement est une réalité permanente de la vie politique, même dans une démocratie.

« L’autorité a disparu du monde moderne »

Hannah Arendt est plutôt critique de la définition que propose Weber de l’autorité, celle liée à la domination. Philosophe de la période d’après-guerre, Arendt repense l’autorité en l’opposant à l’exercice de la violence. L’autorité est donc une forme de contrainte qui ne repose pas sur la force. Mais elle est aussi, paradoxalement, une forme de persuasion qui exclut l’argumentation. Ce qui préoccupe Arendt, c’est l’acte de fondation dont dépend l’autorité. Fait politique et historique, l’acte de fondation, tel une Constitution, est un pacte mutuel entre égaux et génère, en ce sens, un espace politique de liberté. Pour stabiliser l’autorité de ce pacte, cet acte et sa sacralité doivent être reconduits par un effort de mémoire. Ceci est rendu possible par une série d’institutions politiques qui consacrent et répètent, par la tradition, le pacte et son esprit. Arendt dénonce que l’autorité est en crise depuis la Modernité. Cette crise serait due à un défaut de mémoire, à une rupture d’avec les expériences de fondation politique originales. Et ce, notamment à cause d’une conception punitive de l’autorité introduite par l’Église chrétienne mais aussi de la sécularisation du domaine politique. Mais la Modernité constitue aussi, pour la philosophe, l’opportunité de penser collectivement un nouveau pacte mutuel.

« Il n'y a pas d'exercice du pouvoir sans une certaine économie des discours de vérité fonctionnant dans, à partir de et à travers ce pouvoir »

Pour faire l’analyse du pouvoir et de la souveraineté, Michel Foucault déplace notre regard de la philosophie juridique et de ses théories fondatrices, comme l’État de droit, vers les pratiques et les discours des institutions où s’incarnent des rapports de force particuliers. Comprendre les conditions qui rendent certaines relations de pouvoir acceptables implique de saisir leur « raison », soit les discours d’autorité qui les sous-tendent.
Foucault distingue dans l’histoire occidentale récente deux types de discours qui « vérifient » l’autorité du pouvoir politique : d’une part, celui de la souveraineté absolue et du droit et, d’autre part, celui du libéralisme et de l’utilité. Pour Foucault, avec l’apparition des Lumières et leur critique de l’autorité absolue (de droit divin), ce premier mode d’autorisation du pouvoir politique n’a cessé de diminuer au profit de l’essor du second. À partir du XVIIIe siècle, la remise en question philosophique et révolutionnaire du fondement de l’autorité royale a de fait obligé les dépositaires du pouvoir à modifier en profondeur les récits qui rendent leur pouvoir acceptable : le problème de l’excès de gouvernement et la question de son utilité (économique), notamment théorisée par Jeremy Bentham, deviennent graduellement les grands thèmes critiques à travers lesquels sera redéfinie l’autorité du pouvoir politique.

éditorial

Nadège Buquet

À la différence de nos précédents numéros, le choix du thème de cette revue n’a pas été une évidence.

L’intérêt pour le sujet « l’autorité » était pourtant vif et largement partagé au sein de notre équipe. Écrire sur ce sujet est apparu tout à la fois pertinent — au titre de l’Éducation permanente, notre mission n’est-elle pas d’adopter une approche critique, d’interroger les pratiques, les codes, leurs fondements ? — mais aussi éminemment sensible. Pourquoi ?

Comment trouver le juste angle pour traiter d’un sujet qui si spontanément mobilise à son encontre ? Comment faire de ce mot, « l’autorité », l’objet de votre curiosité, mais aussi un support utile à d’autres types de productions autour de cette revue ?

Pour bâtir notre réflexion collective, il aura fallu se départir de ces réserves mais aussi mettre en commun les apports théoriques que chaque auteur et autrice a mobilisés. S’appuyer notamment sur les contributions de Weber, de Foucault, d’Arendt, mais aussi Adorno. Autant d’apports à mettre en résonance, et à interroger, dans le cadre des problématiques retenues : la pratique du squat, les discours austéritaires, le rapport aux machines, l’inceste, la répression…

Une année de travail plus tard, cette revue fédère une équipe mais surtout elle porte très probablement les fondements de la prochaine édition. Parce que chercher à comprendre c’est déjà se mettre en mouvement, l’édition 2026 de Tumult, à n’en pas douter sera encore plus riche de supports et d’initiatives à partager.

Nadège Buquet
Directrice générale de Citoyenneté & Participation

avant-propos

L'autorité

Comment fait-on actuellement l’expérience de l’autorité, dans l’intimité jusque dans les structures collectives ? Comment l’autorité se rend-elle acceptable ?

Si l’autorité de nombreuses institutions sociales et politiques est en crise, d’autres acteurs et de nouveaux discours ne voient-ils pas, en contrepoint, leur légitimité et leur autorité grandir ?

Quelles formes peut prendre la défiance à l’autorité aujourd’hui et quelles stratégies de réplique cette dernière déploie-t-elle ? Quelles frontières de sens mais aussi quels liens historiques peut-on tracer entre discours d’autorité et discours autoritaire ?

Ces questions autour de l’autorité, et bien d’autres, animent la troisième édition de la revue Tumult. Chaque article consacre en effet, vis-à-vis d’un enjeu bien particulier, tel que les politiques austéritaires, les outils d’intelligence artificielle, le droit au logement et la pratique du squat, etc.. , une réflexion autour de l’expérience contemporaine de l’autorité.

E. Raucent

ligne éditoriale

Le pôle "Recherche et Plaidoyers" de l'ASBL Citoyenneté et Participation produit des analyses et études dans une démarche d'Education permanente avec trois objectifs principaux :

Démocratiser l'information en relayant les voix peu entendues

Traiter l'information en combinant préoccupations citoyennes locales et analyses scientifiques globales

Proposer des positionnements critiques et prospectifs sur les enjeux sociaux.

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