Dans ce point, il s’agira d’examiner en quoi les individus peuvent exercer une forme d’autorité morale, conscientisée ou non, et cela même quand ils tentent de s’en prémunir.
Nous pensons que le statut de l'animateur·rice porte en lui une forme de prestige, renforcée par l'appartenance au domaine de l'éducation. Cette position confère à sa parole un poids particulier, souvent perçue comme « vraie ». De plus, l'engagement de l'animateur·rice, qu’il soit réel ou simplement perçu comme tel, envers la communauté agit comme un gage d'intégrité, entrainant une adhésion quasi inconditionnelle à la norme qu'il ou elle incarne. Par ailleurs, d'un point de vue légal, même dans le cadre de l'éducation permanente, le statut d'animateur·rice confère divers pouvoirs, notamment celui de définir les contours des rencontres et d'orienter le processus éducatif. L'animateur·rice est alors perçu·e comme une « personne de raison », capable de guider le groupe en s'appuyant sur les principes de rationalité et d'objectivité.
Les travaux engagés par Nicolas Marion (Marion, 2019) ou Jérémie Piolat (Piolat, 2021) en sont les témoins. En effet, sous couvert d’une « (…) certaine bienveillance » et d’une « (…) relation de complicité avec leur public », peuvent apparaitre des « propos disqualifiant et stigmatisant » de la part des animateur·rices. En effet, certaines postures peuvent laisser la place à une forme de hiérarchisation des savoirs et des discours. Ce qui à notre sens peut motiver chez certain·es une forme d’autorité assumée, autorité dont ils se saisissent pour imposer au détour de cette bienveillance ou complicité, le meilleur des guides à penser. Cela dans un contexte où le secteur non marchand emprunte ses modes d’agir aux entreprises et à la pensée néo-libérale, et où l’on pourrait comprendre le « travail associatif comme celui d’un management de la population destiné à la rendre plus gouvernable » (Marion, 2019).
Le risque de glisser vers une autorité forte – où la quête de toute-puissance et l’oubli de l'autre en tant que sujet deviennent des dérives évidentes – est particulièrement prégnant dans le cadre de l'éducation permanente (EP). Ce risque ne réside pas seulement dans la modélisation des pratiques selon le cadre décrétale, mais surtout dans la tension qui existe entre autorité et autonomie. Cette tension est exacerbée par des facteurs comme le manque de formation, la culture de la conformité et l’isolement professionnel. En effet, les animateur·rices, souvent surchargé·es de travail, peinent à trouver des espaces propices à la réflexion critique et à l'échange sur leurs pratiques.
Parce que cette précarité au travail existe, l’animateur.rice risque plus facilement de se reposer sur la norme (l’information la plus accessible, la plus usuelle, la plus mainstream) pour établir son propos, sa stratégie, son animation. Cela peut, malheureusement, conduire à une forme de simplification excessive ou à une évangélisation des pratiques, là où une approche réflexive et nuancée serait nécessaire.
Dans ce point, il s’agira d’examiner en quoi les individus peuvent exercer une forme d’autorité morale, conscientisée ou non, et cela même quand ils tentent de s’en prémunir.
Nous pensons que le statut de l'animateur·rice porte en lui une forme de prestige, renforcée par l'appartenance au domaine de l'éducation. Cette position confère à sa parole un poids particulier, souvent perçue comme « vraie ». De plus, l'engagement de l'animateur·rice, qu’il soit réel ou simplement perçu comme tel, envers la communauté agit comme un gage d'intégrité, entrainant une adhésion quasi inconditionnelle à la norme qu'il ou elle incarne. Par ailleurs, d'un point de vue légal, même dans le cadre de l'éducation permanente, le statut d'animateur·rice confère divers pouvoirs, notamment celui de définir les contours des rencontres et d'orienter le processus éducatif. L'animateur·rice est alors perçu·e comme une « personne de raison », capable de guider le groupe en s'appuyant sur les principes de rationalité et d'objectivité.
Les travaux engagés par Nicolas Marion (Marion, 2019) ou Jérémie Piolat (Piolat, 2021) en sont les témoins. En effet, sous couvert d’une « (…) certaine bienveillance » et d’une « (…) relation de complicité avec leur public », peuvent apparaitre des « propos disqualifiant et stigmatisant » de la part des animateur·rices. En effet, certaines postures peuvent laisser la place à une forme de hiérarchisation des savoirs et des discours. Ce qui à notre sens peut motiver chez certain·es une forme d’autorité assumée, autorité dont ils se saisissent pour imposer au détour de cette bienveillance ou complicité, le meilleur des guides à penser. Cela dans un contexte où le secteur non marchand emprunte ses modes d’agir aux entreprises et à la pensée néo-libérale, et où l’on pourrait comprendre le « travail associatif comme celui d’un management de la population destiné à la rendre plus gouvernable » (Marion, 2019).
Le risque de glisser vers une autorité forte – où la quête de toute-puissance et l’oubli de l'autre en tant que sujet deviennent des dérives évidentes – est particulièrement prégnant dans le cadre de l'éducation permanente (EP). Ce risque ne réside pas seulement dans la modélisation des pratiques selon le cadre décrétale, mais surtout dans la tension qui existe entre autorité et autonomie. Cette tension est exacerbée par des facteurs comme le manque de formation, la culture de la conformité et l’isolement professionnel. En effet, les animateur·rices, souvent surchargé·es de travail, peinent à trouver des espaces propices à la réflexion critique et à l'échange sur leurs pratiques.
Parce que cette précarité au travail existe, l’animateur.rice risque plus facilement de se reposer sur la norme (l’information la plus accessible, la plus usuelle, la plus mainstream) pour établir son propos, sa stratégie, son animation. Cela peut, malheureusement, conduire à une forme de simplification excessive ou à une évangélisation des pratiques, là où une approche réflexive et nuancée serait nécessaire.
Il est cependant utile de rappeler que la dynamique dans une animation d’éducation permanente se nourrit, de part et d’autre, de la pensée de l’animateur·rice, mais aussi de celle des participant·es. La condition préalable à l’autonomie reste la volonté individuelle de tous et toutes, mais il est crucial de se questionner sur les espaces réels dans lesquels ces marges d’action peuvent effectivement se développer et s’épanouir. Mais rappelons une fois encore que c’est bien le/la travailleur·euse qui guide l’action.
Dans les dynamiques de l’EP, la simple action de « mener » pourrait déjà illustrer une forme d’autorité. Nous allons toutefois plus loin et soutenons que le choix des méthodes véhicule une forme de domination, même si cette dynamique cherche à être évitée.
Comment cette logique de domination se concrétise-t-elle ? Tout d’abord, le pouvoir de sélection des outils éducatifs implique une autorité implicite, car chaque choix reflète des valeurs et des priorités spécifiques. En effet, le simple choix des images dans un photo langage peut induire un champ de réflexion trop réduit, ou encore à l’image de la pensée du travailleur lui-même. Si les animateur·rices imposent leurs sélections sans consulter les personnes impliquées dans le groupe, cela peut engendrer une relation de domination. Les choix réalisés sont induits par un prisme de pensée.
D’autre part, l’exclusion des voix est une autre problématique : un choix unilatéral risque de négliger les expériences et connaissances des apprenant·es, limitant leur engagement actif et leur autonomie.
Pour finir, ne négligeons pas le contexte et la variabilité des données à prendre en compte. Un instrument efficace dans un environnement peut se révéler inadapté dans un autre. Ignorer les spécificités culturelles et sociales des apprenant·es peut renforcer des relations de pouvoir.
Nous venons de voir que la posture, le rôle ou encore les normes culturelles peuvent impacter le travail d’animation et induire des formes d’autorité morale. Qu’en est-il alors de l’institution dans laquelle le processus d’éducation permanente est produit ? Quel rôle joue-t-elle dans la posture adoptée par les individus qui y travaillent ?