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Clôture du projet européen CETAL

Quand l’aide alimentaire dépasse les frontières


L’éducation permanente mène le CPCP jusqu’à Rome… Louise, une de nos animatrices en consommation durable s’est envolée vers la capitale italienne fin février pour participer à la clôture du projet européen CETAL (Compétences Émancipatrices pour la Transition Alimentaire) - Compte rendu d’une expérience enrichissante.

Contexte

Le CPCP par son partenariat en éducation permanente avec le service social Accueil Botanique à Liège a pris part au projet européen CETAL1 (Compétences Émancipatrices pour la Transition Alimentaire) qui se clôturait à Rome du 22 au 24 février 2022. Ce projet cofinancé par la commission européenne via le programme Érasmus+ a été mis en place dans quatre pays : la France, la Bulgarie, l’Italie et la Belgique. Au sein de chacun des pays, une ou plusieurs structures à vocation sociale étaient en charge du projet. En Belgique, il s’agit de l’association Le Grain, une association d’éducation permanente, qui poursuit l’émancipation des milieux populaires par la voie de l’éducation.2

Le projet CETAL

Le projet CETAL est un projet européen de recherche-action qui vise à "soutenir des dynamiques communautaires en lien avec l’aide alimentaire et également à analyser leur impact sur les participants en termes de développement de compétences "3. Pour ce faire, le projet a pris appui sur des dynamiques locales d’aide alimentaire. En Belgique, quatre groupes locaux ont commencé le parcours prévu par le projet CETAL en 2020. C’est à cette étape du projet que le CPCP y a pris part via son partenariat antérieur avec Accueil Botanique, une structure d’aide alimentaire liégeoise. C’est donc tout naturellement que le CPCP, le Grain et Accueil Botanique ont collaboré. De juillet 2021 à décembre 2021, le CPCP a co-animé les workshops rassemblant bénévoles, travailleurs sociaux et bénéficiaires au sein d’Accueil Botanique.

Ce projet de recherche-action, prenant comme porte d’entrée l’alimentation, s’intéressait particulièrement au développement de compétences émancipatrices des publics fragilisés. Ces workshops avaient pour vocation de comprendre si l’expérience d’aide alimentaire permet aux bénéficiaires de gagner en autonomie, de s’émanciper et plus spécifiquement d’être véritablement acteurs de l’aide alimentaire. Mis à part ces objectifs généraux, sur le terrain, les projets ont été assez variés au sein des différents groupes belges et des groupes des autres pays. Les projets allaient de la création d’épicerie sociale, la mise en place de potagers, la rédaction d’une pétition, l’apprentissage de la cuisine jusqu’à la réalisation de balades botaniques.

La collaboration avec Accueil Botanique

Au sein du groupe d’Accueil Botanique, nous avons décidé au départ de nous pencher sur la qualité de l’alimentation par le biais de la lecture d’étiquettes. Ce projet s’est donc tout naturellement orienté vers l’équilibre alimentaire. Le processus a connu différents stades de réflexion avant d’aboutir sur l’envie de rédiger une pétition suite à un constat posé par le groupe : le manque de protéines fraîches dans les colis. En effet, ceux-ci ont été analysés lors d’un atelier où nous avons étudié chaque produit et notamment la quantité de protéines correspondantes. Ce faisant, nous nous sommes aperçu que ces protéines sont présentes en assez grande quantité, mais rarement fraîches et non transformées.

Cette pétition a été signée par 168 bénéficiaires des diverses structures du Centre Liégeois de Service social. Quelques bénéficiaires ont ensuite porté ce message auprès du Panier solidaire4. Ils ont été reçus par quelques membres du conseil d’administration et ils ont pu leur expliquer leur démarche, le succès de la pétition et enfin leur souhait : recevoir plus souvent des protéines fraîches : viande, œufs et poisson. Le Panier solidaire a été réceptif à leur demande car l’amélioration de la qualité et de la diversité des produits fait partie de leurs objectifs. Cependant, le fait de travailler avec les invendus alimentaires leur donne peu de possibilités d’agir sur la quantité de protéines. À l’heure actuelle, c’est principalement l’Union européenne via son Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD) qui possède un réel pouvoir d’action sur la quantité, la qualité et la "diversité5" des produits distribués dans l’aide alimentaire en Belgique. Cependant, le Panier Solidaire a tout de même salué la démarche du projet CETAL, à savoir la création de groupes de réflexion rassemblant bénévoles, bénéficiaires et travailleurs sociaux. Une véritable plus-value pour l’aide alimentaire !

La clôture internationale à Rome

Pour clôturer le projet – par la rédaction d’un plaidoyer européen, les partenaires de chaque pays accompagnés d’une délégation représentative des projets locaux se sont rassemblés à Rome durant trois jours. Ces journées ont été riches en échanges et en apprentissages pour tous car rassemblant encore une fois des personnes aux horizons divers : bénéficiaires de l’aide alimentaire, travailleurs sociaux, bénévoles, etc. L’événement a débuté par la présentation du projet de chacun des groupes. Ces projets étaient d’autant plus variés que les groupes l’étaient, le public cible de chaque association étant différent : personnes SDF, personnes déficientes mentales, bénéficiaires de l’aide alimentaire. À la suite de ces présentations, nous avons pu établir des liens entre les projets. Six grandes catégories d’idées ont ainsi été définies. Par l’utilisation d’un outil de prise de décision démocratique et ludique, le 356, chacun des participants a voté pour le groupe d’idées qu’il trouvait nécessaire de développer au sein du plaidoyer européen. Notre choix s’est porté sur la question du choix, de la dignité, de l’autonomie, de la singularité, des droits et de l’action ainsi que celle de l’aspect qualitatif de l’alimentation.

Que retenir de cet événement ?

Le message principal à retenir à l’issue de ce projet est donc la nécessité de considérer les bénéficiaires de l’aide alimentaire comme des acteurs à part entière de celle-ci. En très bref, ce n’est pas parce que l’on dépend de l’aide alimentaire que l’on n’a pas de droits, que l’on n’est pas un être singulier avec des spécificités, que l’on n’est pas capable d’être acteur de sa propre vie. Le message principal du plaidoyer européen s’est donc concentré sur ce message : ne plus être invisible, être acteur, choisir et agir. Ce message ayant été rédigé en différentes langues, un travail de traduction et de développement est à réaliser par chaque pays membre. En Belgique, le plaidoyer a été retravaillé par la délégation belge et sera présenté par des bénéficiaires d’Accueil Botanique lors d’une conférence de presse le 31 mars à Liège. Ce plaidoyer prendra ensuite la forme d’une lettre ouverte et sera envoyé aux personnes compétentes aux différents niveaux de pouvoir belges et européens.


1 Poujol V., « CETAL : présentation du projet », Léris, [En ligne :] CETAL : Présentation du projet - Leris, consulté le 22 mars 2022.

2 Le Grain ASBL, « Les visées de le Grain – atelier de pédagogie sociale », Le Grain, [En ligne :] https://www.legrainasbl.org/index.php?option=com_content&view=article&id=109&Itemid=120 , consulté le 27 mars 2022.

3 Bertha M., « L’aide Alimentaire comme point d’entrée vers l’émancipation ? », Le Grain, [En ligne :] L’aide alimentaire comme point d’entrée vers l’émancipation ? (legrainasbl.org), consulté le 17 mars 2022

4 Une association qui se définit comme association faîtière de collaboration entre associations-membres, travaillant dans le domaine de l’aide alimentaire à Liège-Ville et qui a pour objectif de développer une plate-forme de redistribution des invendus alimentaires ainsi qu’une épicerie sociale.

5 Le Fond européen d’aide aux plus démunis est un mécanisme de solidarité organisé au sein de l’UE. Selon le choix de l’État membre, il permet de financer l’achat de denrées alimentaires destinées à l’aide alimentaire ou d’autres mécanismes de soutien. La Belgique a fait le choix de l’achat de denrées alimentaires : 20 références de produits de base sont alors proposées aux associations actives dans l’aide alimentaire. Cela a comme conséquence que les produits provenant du FEAD sont similaires de semaine en semaine au sein d’une même structure. Les bénéficiaires se plaignant alors parfois de cette répétition.

6 Jeu inspiré des jeux-cadres de Thiagi permettant de comparer deux par deux des propositions plus nombreuses. Chaque participant choisi l’idée qui lui plaît le plus parmi la sélection et ensuite va la comparer avec celle d’un autre participant. A deux ils décident d’attribuer aux propositions un nombre total de 7 points (0 et 7 ; 1 et 6 ; 2 et 5 ; 3 et 4). Il y a 5 tours identiques ce qui fait qu’à l’issue des 5 tours, une proposition aura maximum 35 points. La proposition qui l’emporte est donc celle qui a le plus de points car elle aura convaincu le plus de participants. Plus d’infos via ce lien : Gestion des réunions - 35 - (mieux-apprendre.com)

Un article de Louise Vanhèse, animatrice en éducation permanente - Consommation Durable - vanhese@cpcp.be