Analyse n°418 de Axelle Durant - septembre 2020
En cette période anxiogène et exceptionnelle qu’est la pandémie du coronavirus, la grande majorité de la population est dans l’attente, l’interrogation et la crainte vis-à-vis du confinement, de la distanciation sociale, de la propagation de la maladie, de l’avenir des secteurs économique, social et médical… Ce sentiment d’insécurité entraîne un foisonnement de fake-news, de désinformations et de théories du complot en tous genres. Certaines de ces théories du complot verraient l’introduction de la 5G dans notre pays comme le déclencheur de la pandémie ou le coronavirus comme une maladie créée de toutes pièces ou une machination venue du gouvernement chinois pour affaiblir les pays occidentaux dans la construction de l’économie mondiale… Le développement de ces théories du complot en cette période spéciale est dû, en grande partie, à une communication manquant de clarté, et exprimant certains doutes de la part des autorités fédérales. Ces mêmes autorités paraissent désolidarisées dans leurs différents niveaux de pouvoir, par les contradictions et incompréhensions apparues lors des premiers instants de la gestion de la crise sanitaire du Covid-19.1 Néanmoins, comment expliquer l’évolution de théories complotistes au sein de la population mondiale en cette phase de confinement, de risque sanitaire et de péril mondial ? Quelles sont ces théories du complot ? Comment expliquer leur création et leur expansion ? Certains hommes politiques connus à l’échelle internationale sont friands de ce genre de théories du complot, tel que Donald Trump. Quelles sont les répercussions de l’utilisation politique de ce genre de théorie au niveau international ?
Analyse n°417 de Marine Streel - juillet 2020
Dans l’enseignement obligatoire en Fédération Wallonie-Bruxelles, le nombre d’élèves issus de l’immigration est important et particulièrement dans la Région bruxelloise. En effet, 40 % des élèves sont d’origine étrangère à Bruxelles et 20 % en Région wallonne.1 Les écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles sont donc confrontées à une grande diversité culturelle dans leur public d’élèves, ce qui les amène à tenter de comprendre et d’éclairer les défis posés par les questions migratoires. Les enfants et adolescents confrontés à des différences linguistiques et culturelles entre le milieu familial et l’école, et provenant d’un milieu socio-économique défavorisé éprouvent certaines difficultés tout au long de leur scolarité. De plus, le manque de perméabilité au sein du système scolaire et les différences de qualité entre écoles peuvent déboucher sur un écart important entre les résultats scolaires des élèves immigrés et des élèves autochtones. La problématique de l’immigration pose également la question du bien-être du jeune, qui ressent souvent un sentiment d’aliénation dû à un bouleversement total des codes culturels et sociaux par rapport à son pays d’origine. Cette analyse vise à mettre en exergue les différentes variables pouvant avoir un effet sur la scolarité des jeunes immigrés. Nous nous attarderons plus spécifiquement sur les élèves immigrés de première génération qui intègrent donc le cursus scolaire belge plus tard. La première partie servira à exposer principalement les sources des difficultés des élèves immigrés qui se répercutent généralement sur tout le parcours scolaire. La partie suivante sera consacrée au fonctionnement et au positionnement institutionnel peu égalitaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles face à son public d’élèves diversifié et multiculturel. Les principaux dispositifs et décrets initiés au cours des dernières années dans l’enseignement de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui visent à tendre vers une école plus juste seront également exposés. L’analyse vise à s’approprier une représentation globale des déterminants sociaux, culturels et systémiques qui peuvent être la cause d’un parcours scolaire difficile pour ces élèves, mais il est judicieux de ne pas en faire une généralisation, tant les cas de ces élèves peuvent être variables.
Analyse n°416 de Axelle Durant - juillet 2020
En cette période spéciale de quarantaine liée à la pandémie du Coronavirus, la population se tourne plus que d’habitude vers les services proposés grâce aux nouvelles technologies. Que ce soit pour continuer à travailler à distance grâce au télétravail, pour commander ses courses en ligne pour éviter de croiser trop de monde dans les magasins alimentaires restés ouverts, pour se faire livrer une pizza via une application sur son smartphone ou pour profiter d’une soirée devant un film ou un épisode d’une série issus d’une plateforme spécialisée. En 2020, ces nouvelles technologies sont devenues indispensables dans tous les secteurs de la vie et du travail. Cette analyse va tout d’abord baliser la question au travers de quelques interrogations : que sont les nouvelles technologies ? En quoi ont-elles révolutionné la vie de près de deux tiers de l’humanité ? Entre individualisme et sociabilité, comment ont-elles changé la face du monde depuis plus de deux décennies ? Quels en sont les avantages et les inconvénients ?… Ensuite, le cœur de la publication se consacrera à l’éducation. En quoi les nouvelles technologies peuvent-elles être bénéfiques pour l’apprentissage, la pédagogie ou le développement des élèves du secondaire ou étudiants supérieurs ? Sont-elles toujours bénéfiques ? N’y a-t-il aucun danger lors de leur utilisation pour les adolescents ? Les nouvelles technologies sont-elles vraiment nécessaires dans une salle de classe ? Cet article va tenter de répondre à ces nombreuses questions, en se focalisant sur les adolescents et jeunes adultes.
Analyse n°415 de Clara Van Der Steen - juillet 2020
Aujourd’hui, le géant de la livraison UberEats tire sa réussite de sa plateforme collaborative qui facilite les échanges entre les clients et les producteurs. 1 Cette plateforme numérique a servi de modèle à de nombreuses entreprises afin de maximiser et de rentabiliser la livraison à domicile ; ceci n’est pas sans influencer les habitudes de consommation alimentaires. L’avènement de ces nouvelles plateformes de livraison – UberEats, Deliveroo, Stuart ou encore Foodora – est un phénomène récent dans nos sociétés contemporaines qui se place au sein d’une économie moderne qui repense les structures traditionnelles et appelée "économie collaborative". Le fonctionnement de ces plateformes de livraison dépend toutefois d’un intermédiaire effectuant la liaison entre le repas servi à domicile et l’établissement fournissant le produit fini ; il s’agit du livreur qui accomplit le "dernier kilomètre". Si les entreprises de plateforme vantent les mérites de leurs nouvelles formes d’activités, il semble que les conditions de travail de ces livreurs ont déjà été plusieurs fois remises en question au sein de ces mêmes sociétés. La question se pose : quelle est la place des livreurs dans les plateformes de livraison de repas à domicile ? Cette analyse apporte un éclairage sur les différents acteurs intervenant pour gérer ces fonctions et sur les impacts directement vécus par les livreurs. Seront également analysées les stratégies mises en place par les entreprises pour attirer une nouvelle main d’œuvre prête à l’emploi tout en contribuant à sa dévalorisation.
Analyse n°414 de Marine Goethals - juin 2020
En Belgique, en 2018, 20 % de la population présente un risque de pauvreté ou d’exclusion sociale.1 Si on y regarde de plus près, on observe de grandes disparités régionales. En effet, ce taux se situe en Wallonie entre 17,6 % et 26 %, autour de 10 % en Flandre contre environ 30 % à Bruxelles.2 Dans cette dernière région, les travailleurs sociaux, les médecins généralistes, les éducateurs, les policiers constatent une augmentation doublée d’une complexification des problématiques liées à la santé mentale en Région de Bruxelles-Capitale 3 ainsi qu’une augmentation des problématiques sociales en général. S’il ne s’agit pas pour autant d’un phénomène exclusivement bruxellois, la situation de Bruxelles est particulièrement inquiétante, cette analyse se concentrera donc sur le cas de la capitale. Face à des situations de grande détresse où la pathologie constitue un problème parmi d’autres et semble davantage liée au contexte socioéconomique dans lequel évolue la personne 4, les intervenants de première ligne éprouvent un certain malaise professionnel. Ce constat est relayé par la communauté scientifique 5 et les intervenants eux-mêmes. En décembre 2016, la coordination de l’action sociale de Schaerbeek (CASS) organisait une journée d’étude dont le thème était "précarité et santé mentale : qui mène la danse ?". En mars 2018, la fédération des associations de médecins généralistes de Bruxelles (FAMGB) tirait la sonnette d’alarme avec la publication du Livre noir de la santé mentale à Bruxelles 6 dont l’objectif était d’interpeller le monde politique sur la difficulté de l’accès aux soins de santé mentale à Bruxelles. En 2019, une enquête a été menée par la plateforme de concertation pour la santé mentale en région de Bruxelles-Capitale (PFCSM) auprès des dix-neuf CPAS bruxellois concernant l’accès aux soins de santé mentale des usagers. Le constat est identique : les travailleurs sociaux sont de plus en plus confrontés à des problématiques de santé mentale chez les bénéficiaires des CPAS. 7 Avant toutes choses, il importe de clarifier : contrairement à une idée à rebours du sens commun, précarité socioéconomique et problématique de santé mentale ne concernent pas uniquement les personnes sans-abris qui sont désorientées, parlent parfois seules ou consomment de l’alcool sur la voie publique, par exemple. Cette réalité touche de plus en plus de personnes et émerge dans des situations qui deviennent relativement courantes. La précarité maintient les individus qui en souffrent "dans des vécus angoissants qui ne font que renforcer leur vulnérabilité ou qui limitent leur accès aux soins".8 Il est évident que les conditions d’existence précaires ont des effets sur le plan psychique ou psychiatrique : anxiété, dépressions, psychoses, angoisses, etc. Démunis face à des situations mêlant santé mentale et précarité sociale aiguë, les professionnels de première ligne se tournent naturellement vers les différents services de santé mentale : maisons médicales, ailes psychiatriques des hôpitaux, centres de cures, etc. Actuellement, l’offre de soins psychiatriques est relativement diversifiée, mais insuffisante face aux besoins.9 Par ailleurs, l’offre a dû s’adapter et elle sera encore amenée à le faire. En effet, les évolutions économiques et sociales de notre société ont eu pour effet d’élargir le champ de la psychiatrie à des problématiques qui n’en faisaient habituellement pas partie comme les assuétudes, la violence, le stress au travail, les adolescents en difficulté, etc.10 Aujourd’hui, la santé mentale ne recouvre plus seulement les pathologies psychiatriques et leur traitement en hôpital psychiatrique comme c’était le cas auparavant. Cependant, l’offre de soins proposée par les services de santé mentale est-elle suffisante pour répondre à des problématiques intimement liées au contexte socioéconomique difficile du patient ? Les psychologues n’ont pas les moyens de résoudre nombre de problématiques sociales telles que l’accès au logement, à l’aide sociale, à l’emploi, etc. Par ailleurs, les travailleurs sociaux sont peu ou pas formés aux troubles de santé mentale et doivent pourtant prendre en charge les personnes qui en souffrent. Dans cette perspective, la santé mentale doit impérativement être revue à l’aune des nouvelles problématiques propres à notre époque en pleine mutation (précarité socioéconomique en augmentation constante mais également burn-out et stress au travail, réseaux sociaux, etc.). L’OMS s’attend d’ailleurs à une augmentation des problématiques de santé mentale dans les prochaines décennies. L’objet de cette analyse est d’étudier les liens entre l’augmentation des problématiques de santé mentale observée par les acteurs de terrain et la précarisation croissante de la population. Il s’agit d’une question complexe mêlant santé et social qui nécessite donc une approche transdisciplinaire. Il sera d’abord question des effets de la précarité sur le psychique. Nous verrons comment la réforme du secteur de la santé mentale tend à s’adapter aux nouveaux enjeux. Il sera ensuite question de l’origine sociale de la souffrance psychique. Enfin, nous évoquerons la situation dans les CPAS et les missions des travailleurs sociaux qui sont en première ligne pour répondre à ces problématiques.
Focus du CAD de Thomas Smets - juin 2020
Le 31 janvier 1986, à l’occasion d’une conférence de presse organisée à Bruxelles au sein du Centre de Presse International, le Parti Social-Chrétien (PSC) et le Parti Réformateur Libéral (PRL) annoncent la conclusion d’un pacte d’alliance engageant les deux formations politiques pour huit ans. Ce focus, sur base de documents conservés au sein du centre d’archives du CPCP, se propose de retracer les tenants et les aboutissants de cette alliance avortée.
Analyse n°413 de Solène Houzé - juin 2020
S’il y a bien une affirmation sur laquelle tout le monde peut s’accorder en 2020, c’est que la dernière décennie aura été fort marquée par des mouvements de contestation de toutes sortes. Combats féministes, grèves, manifestations et mouvements à l’échelle nationale, marches pour le climat, contre les violences policières, contre les discriminations, les citoyens et citoyennes n’hésitent plus à faire entendre leur voix, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans la rue. Que réclament-ils ? Entre autres, plus d’égalité, de démocratie, de transparence et d’actions de la part des politiciens et aussi, plus de justice. Ainsi, les concepts de justice sociale et environnementale sont de plus en plus présents dans le paysage médiatique et politique. Si la tendance était au départ de les traiter comme deux problématiques séparées, les contestations de ces dernières années ont révélé que les thématiques de l’écologie et du social ne sont pas si éloignées que ça. Le mouvement des gilets jaunes a d’ailleurs permis de révéler des liens profonds entre actions écologiques et actions sociales. Le message est clair : la lutte contre le dérèglement climatique ne se fera pas sans une lutte contre les inégalités socio-économiques.1 Si les différentes contestations ont permis de faire émerger un début d’alliance entre les acteurs sociaux et environnementaux, de multiples pressions sociétales continuent de vouloir opposer les deux problématiques. Il est grand temps de renforcer cette alliance en rappelant les logiques qui sous-tendent la convergence des luttes du XXIe siècle et d’en faire une priorité dans le travail de notre association, pour la transition et pour la société en général. En 2018, Dounia Tadli 2 analysait le manque de convergence et de coopération sur le terrain entre les mouvements de Transition, adeptes de la sobriété volontaire et ceux de lutte contre la pauvreté. Leurs objectifs sont pourtant les mêmes : une société plus juste, plus solidaire, une plus grande utilisation des ressources locales, l’importance des liens sociaux, une viabilité écologique de la consommation, etc. Pourtant, les mouvements de Transition restent trop souvent le lieu de rencontre de personnes au capital culturel et économique plus élevé. Face à ce constat, le Centre Permanent pour la Citoyenneté et la Participation souhaite tout mettre en œuvre pour adresser des réponses à cet enjeu d’accessibilité des alternatives de transition à tout citoyen ou groupe de citoyens désireux de découvrir ou d’agir à son échelle sur les problématiques de consommation durable. La transition vers une société plus juste et durable ne peut pas exclure les publics en situation de précarité. Elle se doit d’être obligatoirement solidaire. Si nous allons encore plus loin, nous affirmons même que la transition ne se fera pas sans eux. Cette analyse veut donc poser les cadres théoriques de ce rapprochement entre combats sociaux et environnementaux, en commençant par définir les concepts de justice sociale et environnementale et en développant les liens existants entre les deux mouvements. Sur le terrain, dans nos groupes en éducation permanente, il existe un réel besoin de pistes concrètes pour aborder la question environnementale en lien avec les enjeux socio-économiques que connaissent les publics en situation de précarité. Nous proposons des pistes de réflexion et des leviers d’action pour répondre à ce besoin. La première partie se penchera sur la théorie de la convergence des luttes environnementales et sociales en parcourant l’historique des différents mouvements et en analysant l’apport de la crise des gilets jaunes dans cette problématique. La seconde présentera le projet transversal du CPCP qui se penchera sur la question de l’accessibilité aux mouvements de transition pour des publics plus précarisés, en collaboration avec le Réseau Transition. Elle abordera également la redéfinition de problématiques en éducation relative à l’environnement par la prise en compte des enjeux sociaux.
Analyse n°412 de Karin Dubois - mai 2020
Les liens entre la qualité de la nourriture et le fonctionnement de notre cerveau sont un sujet d’étude sur lequel bon nombre d’équipes scientifiques planchent depuis quelques années. Nous voyons donc affluer de plus en plus d’articles nous mettant en garde contre les effets de ce que l’on nomme communément la malbouffe sur la bonne forme de nos neurones et en particulier, les capacités d’apprentissage des enfants et des ados. Ainsi, parmi les causes qui mènent l’enfant aux difficultés scolaires, nous pouvons fort probablement pointer une surconsommation de produits que l’on estimait inoffensifs à une époque ; des sodas, des bonbons colorés, des frites… bref des produits que l’on a même insérés dans un système de récompense ; "si tu es sage, tu auras un bonbon", "si tu travailles bien à l’école, je t’emmènerai au fast-food", etc. Le système de récompense, parlons-en ! Il n’est pas que familial. Il se situe aussi dans une partie du cerveau humain. Ce qui rend les comportements alimentaires sains plus compliqués. Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes, n’attendons pas de nos enfants et de nos ados de développer un comportement raisonnable face à la nourriture. Ils n’en sont pas capables. Dans leur cerveau, c’est l’affrontement permanent entre d’un côté le cortex préfrontal qui participe au contrôle du comportement et des pulsions ainsi qu’à la prise de décision mais qui n’est malheureusement pas fini avant l’âge de 20 ans et de l’autre côté le système de récompense 1 qui lui se développe très tôt. Ce combat est complètement inégal. Quand on sait cela, on comprend déjà mieux pourquoi nos enfants ont toutes les peines du monde à se retenir devant un paquet de chips ou de bonbons. Ils ont un besoin insatiable de récompenses. Leur cerveau grandit et les récepteurs de dopamine (la molécule du plaisir) tournent à plein régime. Ils ont beau savoir que la nourriture grasse et sucrée est néfaste pour leur santé (parce que nous passons du temps à leur répéter), ils craquent tout de même pour un paquet de bonbons ou une mitraillette andalouse avec cola. Car, ce qu’ils ne savent pas, c’est que leur cerveau est modelé par l’expérience. Ce qui signifie que les comportements alimentaires acquis durant l’adolescence risquent de s’imprimer durablement une fois que leur développement sera terminé. Un ado accro à la malbouffe a de fortes probabilités de devenir un adulte accro à la malbouffe. C’est dire à quel point l’adolescence est un moment charnière au niveau alimentaire. Si on n’arrive pas à déprogrammer la malbouffe de leur comportement, non seulement nos ados iront rejoindre le flot des "septante pour cent des adultes de 40 ans qui pourraient avoir un excès de poids ou être obèses d’ici 2040" 2 mais en plus, il est probable de voir leurs performances scolaires diminuer. Car oui, bien manger n’est pas qu’une question de poids ou de diabète. Avoir accès à une alimentation saine c’est aussi donner aux cerveaux de nos enfants les chances de fonctionner de manière optimale et d’apprendre dans de meilleures conditions. Les études scientifiques que nous mettrons en évidence dans cette publication convergent vers un même constat : une surconsommation de sucres, de graisses et d’additifs perturbent l’apprentissage des jeunes. Mais attention ! Nous invitons ici le lecteur à être prudent. L’alimentation n’est pas le seul facteur à prendre en compte quand il s’agit de s’interroger sur les performances scolaires de son enfant. Une multitude de situations doivent être analysées : quel est son contexte familial ? Vit-il au sein d’une famille monoparentale ? Est-il témoin de violences conjugales ? Les parents sont-ils disponibles ? A-t-il d’autres modèles dans la famille ou le voisinage ? Une fratrie ? Quelle est la qualité de ses liens affectifs ? Ces liens peuvent-ils lui apporter de l’estime de soi, de la confiance ? Dans quel cadre de vie évolue-t-il ? Quelle est la situation financière ? Vit-il à la campagne ? À la ville ? A-t-il accès à des jeux ? Dispose-t-il de sa propre chambre ? Combien de temps passe-t-il devant un écran chaque jour ? Quel type d’enseignement suit-il ? La méthode repose-t-elle sur la performance ? La notation des compétences ? Quel est son bagage génétique ? Etc. Même si nous ne sommes pas complets sur le sujet, nous percevons bien que c’est une multitude de facteurs qui rentrent en compte et qui ont chacun un rôle dans les dynamiques d’apprentissage de l’enfant et de l’adolescent. L’alimentation fait partie de ces facteurs. Mais même s’il n’est pas seul, il ne faudrait pas le négliger. Il constitue ce que l’on peut appeler un facteur aggravant. Quels sont les effets de la malbouffe sur l’apprentissage des enfants et des adolescents ? C’est ce que cette publication tente d’appréhender. D’autant que le rapport entre la nourriture et la santé des enfants est abordé fréquemment lors de nos ateliers en éducation permanente et qu’il nous semble opportun de pouvoir dresser un inventaire relativement complet des effets que peuvent ressentir les enfants et les ados après avoir ingurgité du gras et du sucre. Dans la première partie de cette publication, nous ferons le point sur le fonctionnement de la mémoire et sur les conditions nécessaires à l’apprentissage. Mais si vous souhaitez aller droit au but et découvrir les effets de la malbouffe sur le cerveau de nos progénitures, vous pouvez commencer votre lecture à partir de la page 8.
Analyse n°411 de Véronique Sevrin - mai 2020
Depuis 2014, la Wallonie s’est dotée, à l’instar de la Flandre, d’un parcours d’intégration obligatoire 1 pour accueillir et accompagner les nouveaux résidents étrangers de Wallonie, les aider à acquérir les connaissances de base sur le fonctionnement de la société et des relations sociales en Belgique et faciliter leur intégration sur le territoire 2. À noter que Bruxelles a également mis sur pied un parcours d’accueil dont le caractère obligatoire a du mal à passer les méandres complexes des institutions bruxelloises. Le décret aurait dû entrer en vigueur en janvier 2020 3. Le parcours wallon se compose de quatre étapes : accueil personnalisé comprenant un bilan social, une information sur les droits et devoirs, une aide ou une orientation vers les services d’aide aux démarches administratives et un test d’évaluation de français ; formation à la citoyenneté ; formation en langue française si besoin ; orientation socioprofessionnelle si besoin 4. Une publication du CPCP a déjà été consacrée à l’approche globale de la citoyenneté dans le parcours d’intégration wallon 5, nous nous pencherons ici sur le volet des ateliers d’orientation citoyenne (AOC).
Analyse n°410 de Karin Dubois - mai 2020
Smartphone, console de jeux, télévision, ordinateur, tablette, etc. Aujourd’hui, quel que soit son milieu social, l’enfant grandit dans un environnement médiatique et numérique. Et ce milieu n’est pas sans conséquences sur le développement des enfants, des ados et le bien-être des familles. D’autant plus que ces outils ont évolué depuis une dizaine d’années ; leur format est plus attractif et il est donc plus difficile de contrôler leur interruption. Hormis la télévision, ils sont tous portables et donc utilisables à tout moment et pendant un temps indéterminé. La prolifération de programmes destinés aux enfants abonde d’arguments éducatifs. Et la multiplication d’écrans fait que nous ne regardons plus un seul écran en famille. Aujourd’hui, les membres les consomment de manière isolée. Du coup, le contrôle parental est devenu bien plus difficile. À présent, la consommation d’écrans par les enfants et les ados est donc un thème devenu récurrent au sein de nos ateliers en éducation permanente. Face à l’ampleur du phénomène, il nous a semblé utile de rassembler les témoignages des mamans et des grand-mères avec qui nous avons échangé, de faire entendre leur voix, leurs préoccupations et leur désarroi. Il y a beaucoup à dire sur ce thème. D’ailleurs le nombre d’études scientifiques sur le sujet a explosé depuis quelques années. Nous nous concentrerons ici sur l’impact des écrans sur l’apprentissage des enfants sous diverses formes ; l’apprentissage scolaire, mais aussi des codes sociaux et familiaux. Et nous aborderons quelques effets sur leur santé physique et psychique. Nous ne parlerons donc pas ici du rapport entre les adolescents et les écrans qui mériterait une publication à part entière puisqu’en grandissant, les outils de communication se multiplient et confrontent nos plus grands à de nouvelles problématiques générées par Internet et les réseaux sociaux. Nous n’aborderons pas l’utilisation des écrans par les adultes. Et nous n’approcherons que partiellement les phénomènes d’addiction qui ont été traités par Marine Streel dans son analyse intitulée Surexposition aux écrans : une nouvelle addiction juvénile 1. Concentrons-nous sur les enfants puisque de toute façon c’est à ce stade que tout se joue, puisque le temps qu’ils passent devant un écran aura de toute manière un impact sur leur vie d’adolescent. Pourquoi ont-ils un écran en main ? Quels dégâts constate-t-on sur leur comportement ? Quels conseils peut-on dégager ? Quels sont les outils à notre disposition ? Quels sont ceux à développer ? Ce sont autant de questions que nous tentons d’aborder dans cette publication.
Analyse n°409 de Stéphanie Ghuysen - mai 2020
Faites le test ! Entrez "intégration des étrangers" dans votre navigateur web. "Efforts", "condition", "parcours", voici les premiers mots qui apparaîtront dans vos résultats de recherche. Le décor est planté. Derrière le concept d’intégration se trouverait-il, en première ligne, un dispositif restrictif sous forme d’étapes requérant un effort à sens unique ? L’interprétation est lancée. L’analyse peut commencer. Cette publication traite du concept d’intégration et de sa stratégie d’opérationnalisation en Wallonie mise en place depuis 2014. Nous développons notre analyse en trois parties. Dans une première partie, nous portons notre regard sur les notions théoriques de l’intégration, terme polysémique et populaire. Par son inscription dans de multiples domaines et par la profusion de ses définitions, il nous a paru intéressant de questionner sa signification première dans le contexte que nous étudions. Pour ce faire, nous allons nous plonger dans la sociologie, analyser les définitions choisies par l’Union européenne ainsi que la Région wallonne et découvrir celles proposées par des personnes étrangères ou d’origine étrangère. Dans une seconde partie, nous décryptons le parcours d’intégration wallon à partir d’une partie du rapport d’évaluation de l’IWEPS 1 (mai 2019). Ce dispositif bâti sur quatre axes (le module d’accueil, le français langue étrangère (FLE), les formations à la citoyenneté, l’insertion socio-professionnelle (ISP)) répond aux directives de la politique d’intégration relative aux étrangers et citoyens d’origine étrangère en Wallonie. À la lumière des conclusions des chercheurs de l’IWEPS, ce parcours ne permettrait pas de remplir pleinement l’objectif décrétal. Moins institutionnalisées et moins connues, d’autres actions citoyennes semblent, en revanche, pouvoir aider à atteindre les finalités visées dans le décret. Au sein du rapport, différentes hypothèses alternatives sont recommandées, notamment celle du capital culturel et social à laquelle nous choisissons de nous intéresser. La troisième partie de cette analyse présente l’analyse de l’entretien réalisé avec l’ASBL Interra dont les activités répondent, à priori, à ce type d’actions. Interra nous offre sa lecture de l’intégration via les ateliers qu’elle met en place ; une lecture qui amènerait probablement Internet à redéfinir ses mots-clés relatifs à l’intégration et à opter davantage pour "compétences", "rencontre", "autonomie", "vivre ensemble". Enfin, dans la dernière partie, nous concluons en confrontant les données théoriques aux pratiques de l’ASBL Interra. Lire l'interview de Julie, Responsable de l’ASBL Interra
Études du CAD n°6 de Thomas Smets - mai 2020
Les élections législatives belges du 1er juin 1958 se marquent par une nette victoire du Parti Social-Chrétien. En effet, à cette occasion, le PSC remporte 46,5 % des voix, ce qui constitue une augmentation de 5,4 % par rapport aux précédentes élections législatives du 11 avril 1954. Au sein de la structure du Parti, un organisme mis sur pied dès le début de l’année 1957 a joué un rôle central dans cette victoire électorale : la commission de propagande du PSC. La première partie de cette étude, sur base d’archives conservées par le centre d’archives et de documentation du CPCP, se propose de mettre en lumière la manière dont le PSC a anticipé le rendez-vous électoral du 1er juin 1958 en donnant un aperçu des principales actions de la commission de propagande du Parti durant l’année 1957. Auparavant, une brève recontextualisation de la situation politique de l’époque ainsi qu’une analyse de la mise sur pied, de la composition et des missions attribuées à la commission de propagande sera réalisée.
Étude n°31 de Philippe Courteille - avril 2020
En 1996, Sergey Brin et Larry Page, 23 et 24 ans, créent un algorithme de classement des sites internet à la logique simple : plus une page reçoit de visites, plus elle est considérée comme pertinente et bien référencée. Google est né. En 2004, Marck Zuckerberg, 20 ans à peine, et ses copains créent un réseau social sympa pour communiquer entre "amis" : Facebook. Points communs de Sergeï, Larry, Mark et leurs compères : ils sont jeunes, ils sont idéalistes, ils croient en la liberté et aux vertus du Premier amendement 1, le Free Speech, qui interdit de limiter la liberté de parole. Le succès de Google et de Facebook est vertigineux. Début 2019 Facebook comptait 2,7 milliards d’utilisateurs 2 quand, de son côté, Google comptabilisait la même année 80 000 requêtes chaque seconde, soit 6,9 milliards par jour 3. Mais sans le savoir ces jeunes idéalistes ont créé un nouveau territoire inespéré pour les pirates et les chasseurs de trésor de tous bords, ainsi que pour les charlatans et affabulateurs empêchés de s’exprimer dans leurs contrées. Le succès des discours biaisés, dévoyés, intéressés voire radicaux va amener les citoyens à douter de tout ou de rien, et conduire à des campagnes électorales nauséabondes aux quatre coins de la planète. Un aspect dont peu de citoyens et de politiques avaient pris la mesure. Parmi les informations partagées sur les réseaux sociaux, parfois de manière quasi frénétique, des fake-news circulent et défient le travail journalistique mais aussi l’économie, la politique, les sciences. Par plaisir, par imprudence, par défi… les raisons de leur succès sont multiples. En tant que journaliste depuis 23 ans, le phénomène nous a quelque peu interpellés. En quête de vérité et d’honnêteté intellectuelle pour leurs articles, les journalistes sont obligés de constater la baisse d’intérêt pour leurs publications et le succès des fausses informations sur les réseaux sociaux. Plus étonnant encore, la presse est accusée de mensonge et de collusion avec les pouvoirs publics et privés. Côté politique, les populistes rivalisent d’imagination pour sortir les photos et vidéos de leur contexte, apporter des solutions simplistes à des problèmes complexes, décrédibiliser les partis traditionnels et les institutions, accuser l’étranger de toutes les infamies… mais surtout occuper le terrain des réseaux sociaux et jouer avec les fake-news. Les scientifiques se retrouvent à devoir convaincre que l’Homme a marché sur la lune voire même que la terre n’est pas plate. Mais internet serait-il, à lui seul, responsable de cet état des choses ? Et les fake-news constitueraient-elles un danger pour notre démocratie ? Ce sont les questions essentielles auxquelles nous avons tenté de répondre dans cette étude.
Analyse n°408 de Solène Houzé - avril 2020
Actuellement, la dépendance des sociétés humaines à l’environnement dans lequel elles vivent est au cœur de tous les débats et ce constat ne date certainement pas d’hier. En effet, de Platon à Greta Thunberg, en passant par Diderot 1, les humains ne peuvent pas dire qu’ils n’ont pas été prévenus des conséquences dramatiques du dérèglement climatique ou de la perte importante de biodiversité. L’année 2019 a d’ailleurs été particulièrement marquée par des catastrophes naturelles imputables directement au réchauffement climatique. Feux (Californie, Australie), inondations (Inde, Argentine, etc.) et tempêtes(Amérique du Nord, Europe, Bangladesh, etc.) ont ravagé divers endroits du globe et ont causé de nombreuses pertes humaines et financières 2. Plus que jamais, l’humain est conscient de sa dépendance à l’environnement qui l’entoure et des répercussions désastreuses de sa destruction. Nous sommes également conscients de notre responsabilité dans cette destruction. Depuis la Révolution industrielle, les indicateurs virent au rouge, les limites de la planète sont dépassées, diverses espèces sont menacées, les rapports du GIEC sont de plus en plus alarmistes. Bref, notre mode de vie a causé et cause encore la dégradation de notre environnement. Cette rupture des équilibres naturels, due au développement des civilisations modernes, se traduisant par un changement géologique profond, porte le nom d’Anthropocène 3. En clair, l’Anthropocène est une nouvelle ère géologique caractérisée par la modification profonde des couches de la Terre, et ce surtout à cause des activités humaines. Les interrogations concernant notre mode de vie, la croissance, la privatisation et l’ensemble des logiques néolibérales comme dogme économique et leurs conséquences sociales et environnementales néfastes remontent déjà au début des années septante avec le début des recherches et des politiques de protection de l’environnement qui peuvent être analysées à partir de différentes perspectives. L’angle peut être social, par exemple à partir des questions de justice climatique. Il peut être écologique ou économique. La question peut se retrouver dans les domaines de politiques publiques, de recherche scientifique et même dans le milieu industriel ou commercial. Denis Linckens 4 a ainsi approfondi la question de la protection de la nature sous l’angle juridique. Construire un champ juridique et parler en termes de droits de la nature permettrait-il de la protéger et de répondre aux enjeux sociaux et environnementaux du dérèglement climatique et de l’érosion de la biodiversité ? L’auteur tente par cette approche à la fois juridique et anthropologique de prôner l’éloignement de la logique marchande, thème qui sera présenté dans cette analyse.5 L’objectif est ici de décortiquer cette logique marchande qui utilise le concept des services écosystémiques pour contribuer à la protection de l’environnement et de la nature. En effet, pour la critiquer, il semble important de bien comprendre ce qu’elle implique et à quels enjeux fait face la valorisation monétaire de la nature pour sa protection. Le concept de "services écosystémiques" sera donc explicité et remis dans son contexte historique. Quelques exemples de politiques environnementales ayant eu recours à la valorisation de la nature comme argument décisif seront décrits. En découlera une discussion sur les biais et les enjeux de la valorisation de la nature par les services écosystémiques. Enfin, nous tenterons d’approcher ce concept dans un groupe en éducation permanente travaillant sur la question de la protection de la biodiversité.
Analyse n°407 de Maïa Kaïss - avril 2020
Que cela soit dans les médias, dans les débats politiques, à travers des réflexions menées par le secteur associatif ou encore dans les écoles avec les plus jeunes, le sexisme est "the subject to be". Le sujet à la mode dont il faut parler ou sur lequel il faut pouvoir partager une anecdote, avoir un avis, aussi superficiel soit-il. Vos réunions de famille n’auront eu que faire des dernières révélations médiatisées sur le sujet et vous en avez assez ? N’en soyez pas si certain et certaine. Je vous invite, au travers de cet article, à repenser le sujet autrement. Sortons du cadre parfois larmoyant, souvent militant, quelque fois absurde à partir duquel nous avons pris l’habitude de parler de la question du genre. Tentons un détour inattendu, celui de penser le prince charmant ni comme charmant, ni comme crapaud mais comme un homme (prince si vous le voulez) qui peut cumuler l’un et l’autre. Le sexisme bienveillant existe et certaines pourraient aussi décider de s’en servir ! Avant d’aller plus loin sur les énigmes que posent les attitudes cavalières et galantes (qui pourraient aller de pair), revenons sur le concept de sexisme. En effet, il semble essentiel de le redéfinir brièvement afin de s’entendre sur ce dont nous parlons. Trop souvent les discussions se font, alors même que chacun ne labélise pas une situation, un comportement sous le même nom. Le sexisme est entendu ici comme l’ensemble des idées et attitudes préjugeantes, stéréotypées et discriminantes basées sur le sexe et plus largement sur le genre. Progressivement, sa particularité résidera dans le fait qu’en abordant le sexe, le concept ne soulignera plus seulement une différence, mais bien la spécificité du rapport de dominance des hommes exercé sur les femmes. Certaines attitudes, croyances et comportements de domination semblent être justifiés par des préjugés basés sur le sexe et amèneraient les diagnostiqués sexistes à considérer l’homme comme supérieur à la femme. La notion de sexisme est aussi marquée par le fait qu’elle reconsidère la question des inégalités simultanément dans les sphères publiques et privées ainsi qu’à des niveaux individuels et institutionnels. Le sexisme renvoie par son essence, comme tout "isme", à une scission d’un groupe entre "eux" et "nous". Cette division induit indubitablement et progressivement un processus de réflexion et d’identification à la catégorie à laquelle on pense appartenir. Ce chemin semble d’ores et déjà ouvrir à de premières interrogations : la catégorie existe-t-elle per se ou serait-elle le fruit d’une construction sociale ? Sommes-nous prêts à reconnaître cette scission ? Si scission il y a, nous identifions-nous forcément à l’un des groupes ? Notre façon d’envisager la société comme binaire amène-t-elle forcément à justifier le sexisme et par là même ses plus grosses dérives ?
Analyse n°406 de Axel Winkel - avril 2020
MENA. Quatre lettres, initiales d’une réalité bien compliquée. Celle des mineurs étrangers non accompagnés. Ils ont été de plus en plus nombreux à arriver en Europe et en Belgique ces dernières années. Par définition sans parents, ils sont particulièrement vulnérables. Des procédures particulières d’accompagnement ont été mises en place pour eux. Des centres d’accueil leur sont réservés. Un système de tutelle a été créé. Une procédure "MENA" a aussi été mise en place. La Belgique n’est pas un mauvais élève au niveau européen dans la gestion de cette problématique. Mais cela ne veut pas dire que "tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes". De nombreux obstacles se posent encore sur le chemin d’accueil des MENA. Notamment la reconnaissance même de leur minorité, de laquelle découlent toutes ces procédures et protections, ce qui est un gros point noir du système belge comme nous le verrons. Après avoir fait un état des lieux rapide de la gestion de l’accueil en Belgique et des problèmes qui s’y posent, nous passerons à un point que l’on juge essentiel quand on parle des MENA en Belgique ou en Europe : leurs disparitions massives et inquiétantes. Cela constituera le cœur de notre analyse. Car si de plus en plus de MENA sont arrivés sur le territoire européen, cela s’est accompagné d’une explosion des cas de disparitions. Comme nous le verrons, 30 000 MENA auraient disparu entre 2014 et 2017. Un chiffre énorme qui serait pourtant une sous-estimation. Il y a un manque criant de coopération sur cette question au niveau européen et les forces de police sont très peu engagées dans la recherche effective de ces jeunes. Dans le meilleur des cas, ces mineurs ont continué leur chemin vers la destination choisie. Dans le pire, ils ont été pris dans des réseaux de traite d’êtres humains. C’est pourquoi ce point mérite une étude plus approfondie. Nous tenterons d’expliquer les raisons de ces disparitions. Nous les mettrons en relation avec les procédures d’accueil des MENA et nous explorerons des pistes de solutions à cette question essentielle. Car, soyons clairs, nous parlons ici de milliers de mineurs d’âge qui disparaissent et dont on ne retrouve que rarement la trace.
Analyse n°404 de Clara Van Der Steen - mars 2020
En ces périodes troubles, parmi les nombreux impacts qu’a causés la pandémie, une baisse de pollution a pu être observée dans les pays touchés par le coronavirus. S’il est vrai qu’on remarque une diminution de la circulation des véhicules à moteur et une mise à l’arrêt d’une partie des manufactures et usines, la pollution liée au numérique quant à elle, semble en augmentation. En effet, le confinement pousse les individus vers des divertissements facilement accessibles depuis leur lieu de résidence : les plateformes de vidéos en ligne sont par conséquent surutilisées, provoquant l’accroissement de consommation numérique. Toutefois, les stratégies commerciales entreprises par les multinationales détentrices de ces plateformes vidéos ne se sont pas développées en raison de la pandémie et du confinement ; le visionnage de vidéos en ligne est une habitude déjà bien ancrée chez les internautes. Parmi les géants de la vidéo, une multinationale en particulier s’est forgé une solide réputation. L’entreprise Netflix, assurant la distribution et la production d’œuvres cinématographiques et visuelles, est parvenue à fidéliser un vaste public ; de fait, son chiffre d’affaire s’élève à 15,8 milliards de dollars en 2018. Les nouvelles façons de visionner les contenus audio-visuels contribuent sans doute à rendre ce genre de plateforme populaire. Comment une plateforme telle que Netflix s’est-elle développée ? Quelles ont été les dispositions mises en place par l’entreprise qui lui ont valu une telle réussite ? Cet article répond à ces questions en donnant à voir la pensée néolibérale mise à l’œuvre. Par la suite, nous ferons le point sur un problème majeur, à savoir l’impact environnemental, survenant suite à cette consommation excessive de vidéos et sur la manière dont cette problématique est gérée au sein de la société.
Analyse n°403 de Yvonne Mugisha - mars 2020
Le 12 octobre 2019 plus de mille personnes se sont rassemblées pour participer à une action de désobéissance civile à l’initiative d’Extinction Rebellion. Cette dernière avait pour objectif de tenir des assemblées populaires durant vingt-quatre heures, sur la place Royale, afin de discuter des solutions aux problèmes climatiques et environnementaux. Quelques heures après le début de l’action, une centaine de manifestants décident d’entrer dans les jardins du Palais Royal 1 ; situés en zone neutre, où il est interdit de manifester. Ils sont rapidement neutralisés par les forces de l’ordre. Du côté de la place Royale, les rails de tram étant bloqués par les assemblées populaires, la police somme les manifestants de les libérer pour permettre à nouveau la circulation des transports publics. Sans réponse claire de la part des organisateurs, la police commence à évacuer la place en faisant usage de la force. Arrestations administratives en masse, matraques, chiens, usage de spray au poivre, usage de canon à eau sont les différents outils qui ont été employés par les policiers dans le but de mettre fin à cette action. Cette intervention policière a suscité le débat dans les médias et au sein de la société belge. Il parait donc légitime de se demander si les moyens utilisés étaient réellement proportionnés. D’autres manœuvres de dispersion n’étaient-elles pas possibles, plus indiquées ou plus adaptées ? L’opération musclée des forces de l’ordre de ce 12 octobre pose question. Bavure policière ? Législation trop laxiste ? Moyens d’action trop excessifs ? Quand on parle de violences policières, nous avons tous à l’esprit des images de policiers habillés en « RoboCop » se ruant sur un groupe de manifestants. Mais celles-ci peuvent prendre des formes beaucoup plus banales. De nombreux témoignages rapportés sur le site Obspol 2 créé par la Ligue des droits de l’homme (LDH) laissent penser que ce type d’agression peut aussi toucher « Monsieur et Madame Tout le monde ». Dans sa chronique de 2017, la LDH considère que la Belgique, suite à sa condamnation dans l’affaire Bouyid par la Cour européenne des droits de l’homme, est maintenant « célèbre pour l’impunité de certain·e·s de ses policier·ère·s »3. L’affaire Bouyid 4 est celle de deux frères, âgés de 17 et 25 ans à l’époque des faits, disant avoir été giflés lors de leur détention au commissariat de Saint-Josse-ten-Noode. Dans cette affaire, la Belgique a été condamnée en 2015 pour une violation de l’article 3 de la CEDH.5 La Cour a estimé qu’il y a eu infliction d’un traitement dégradant mais également que les frères Bouyid n’ont pas bénéficié d’une enquête effective. Comment de tels comportements peuvent-ils se produire malgré une réglementation assez claire à ce sujet ? Existe-t-il un organe responsable du contrôle des actions des forces de l’ordre ? Quels sont les moyens d’action des personnes se disant victimes de violences policières ? Quelles sont les sanctions applicables et appliquées dans cette matière ? C’est à toutes ces questions que nous allons essayer de répondre. Cet article n’a en aucun cas vocation à blâmer ou stigmatiser les policiers ou leur profession. Les violences policières restent un phénomène isolé ne reflétant pas la réalité du travail difficile et souvent dangereux qu’effectuent les forces de l’ordre. Bien qu’elles ne concernent qu’une petite partie des fonctionnaires de police, elles suffisent à entacher la profession de policier tout entière et à risquer de créer un sentiment d’insécurité et de crainte de la part des citoyens. En Belgique nous vivons dans un État de droit dans lequel la police est le garant de notre sécurité et de l’application de la loi. Le recours à la force et la contrainte sont inhérents à la mission qui leur est confiée. Ils en sont aussi les seuls dépositaires légitimes. Ainsi, afin de maintenir notre démocratie, il est important que cet usage [de la force et de la contrainte] soit clairement encadré et contrôlé. L’objectif de cet article est donc d’avoir une meilleure compréhension de ce phénomène, mais également de fournir plus d’outils aux personnes se disant victimes ou témoins de ces abus de pouvoir.
Analyse n°402 de Axelle Durant - mars 2020
Notre société est de plus en plus riche et complexe à l’aube du XXIe siècle, par la mondialisation, l’interculturalité et la communication ultra rapide et internationale… Néanmoins, l’Homme a depuis l’aube des temps articulé sa réussite évolutive grâce à l’effort commun et partagé : il est forgé par sa culture et la société. L’Homme a donc grandi aussi bien par son intelligence individuelle que par son intelligence partagée avec ses pairs, ce qu’on appelle notamment, son intelligence collective.1 L’Homme reste intrinsèquement un être social, dont le besoin de socialisation et de relations est incontournable et régit sa vie et la société entière. Dès qu’un regroupement est existant, la collectivité apparait et se développe autour d’un but, de valeurs et d’expériences communs. C’est à partir de ce postulat que cette publication a été construite.
Analyse n°401 de Axelle Durant - février 2020
Bien que les sujets liés à l’intégration de l’autisme dans la société soient aussi vastes qu’intéressants (implication sociale, relations amoureuses et familiales, euthanasie, recherche d’emploi…), par souci d’attention et de précision vis-à-vis du sujet de cette publication, ne sera abordé dans le cadre de cet article de vulgarisation que le sujet de l’intégration des enfants autistes dans l’enseignement ordinaire. En Belgique, environ 80 000 personnes présentent un trouble du spectre de l’autisme. Le nombre de cas recensés ne fait qu’augmenter : 850 nouveaux cas seraient détectés par an. La prévalence de l’autisme, et plus généralement des troubles du spectre de l’autisme est d’une personne sur cent.1 Au vu du nombre de plus en plus important de personnes touchées par ce handicap, et également le manque de diagnostics et de services adaptés, il est important de se demander quels sont les besoins et la place des individus autistes au sein de notre société. L’autisme, aussi appelé Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA), qualifie les personnes atteintes d’un trouble envahissant du développement humain, ce qui se traduit par une altération de l’interaction sociale, de la communication, une modification du répertoire des activités et des intérêts ainsi que le caractère répétitif de certains comportements dès la petite enfance. Les personnes autistes peuvent être atteintes de tous ces symptômes ou d’un seul à la fois ; chaque individu autiste est différent et singulier. Les troubles envahissants du développement humain sont caractérisés, catégorisés et classés par le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux 2 ainsi que par la "Classification Internationale des Maladies" de l’Organisation Mondiale de la Santé. Les termes d’"autisme" et de "trouble envahissant du développement" sont remplacés peu à peu par l’expression "Trouble du Spectre de l’Autisme" afin de mieux prendre en compte les spécificités liées aux troubles du développement social et la grande différence entre les symptômes des individus. L’autisme est un trouble du développement. Par conséquent, son évolution et ses manifestations sont différentes en fonction de l’âge de l’individu, de ses compétences, de son expérience mais aussi de son apprentissage. En effet, des études démontrent qu’une éducation mise en place au plus tôt et adaptée aux besoins de l’individu autiste, encourage le développement, l’accessibilité de différents environnements et pallie certaines difficultés rencontrées par ce dernier.3 Il est donc primordial de souligner l’importance de l’éducation et de l’apprentissage liés au développement cognitif, mais aussi du bien-être des personnes autistes et de leur famille. En effet, l’autisme ne se guérit pas mais peut s’améliorer au niveau des symptômes si la pathologie est prise en charge rapidement et conformément aux besoins de l’individu atteint. Les individus autistes ne présentent pas forcement de retard mental ; en effet, environ 50% des autistes ont un développement intellectuel dans la norme. D’autres présentent même un haut potentiel intellectuel. Intégrer ces enfants dans un système scolaire adapté à leurs besoins se révèle donc décisif pour leur permettre un développement personnel optimal. La collaboration harmonieuse entre les individus respectant leurs différences est un thème essentiel dans notre société. Ceci est d’autant plus crucial pour les enfants autistes et leur famille que le manque de certaines techniques de diagnostic nuit au développement personnel, social, communicationnel et scolaire des enfants touchés par un trouble du spectre de l’autisme. C’est dans ce cadre que l’Institut National d’Assurance Maladie-Invalidité (INAMI) a reconnu la nécessité de mettre en place des centres de référence relatifs au diagnostic d’autisme afin d’établir un diagnostic professionnel permettant une prise en charge thérapeutique adaptée aux besoins des patients.4