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Une réduction linéaire des cotisations patronales

Est-ce vraiment une priorité ?

Analyse n°9 de Citoyenneté & Participation - mars 2008


La législature s’est ouverte par l’annonce d’un objectif fort : la création de 200 000 emplois. Le thème de l’emploi et celui de la compétitivité de notre économie seront également au centre de la campagne électorale. Il est dès lors naturel que les partenaires sociaux, l’encre de l’accord interprofessionnel à peine sèche, prennent position sur ces thèmes. C’est notamment le cas de la Fédération des Entreprises Belges (FEB) qui vient de publier un mémorandum énonçant les objectifs principaux que devrait, selon elle, se donner la politique économique.
Ce mémorandum synthétise le document Stratégie 2010 1 publié voici un an par la FEB. Or, en dépit de la diversité des mesures préconisées dans ce document, l’essentiel de l’effort financier demandé est consacré à une réduction linéaire des cotisations patronales. Cette priorité accordée à une réduction linéaire pose doublement question.
Premièrement, elle est en contradiction avec différentes études qui suggèrent qu’une politique de réduction des charges sociales fortement ciblées sur les travailleurs peu qualifiés contribuerait nettement plus efficacement à la lutte contre le chômage que le dispositif actuel relativement linéaire.
Deuxièmement, l’importance des réductions demandées pourrait menacer la poursuite des autres politiques préconisées. Il importe par conséquent de se demander s’il ne serait pas préférable de concentrer l’essentiel des efforts sur un autre type de politique, à savoir l’investissement dans la recherche et la formation des travailleurs.
Le présent article est consacré à cette double interrogation. Après avoir brièvement résumé le document Stratégie 2010, nous présenterons la politique actuelle de réduction des charges sociales et les principaux arguments invoqués en faveur de réductions plus ciblées. Nous essayerons ensuite de percevoir quels sont les arguments qui pourraient malgré tout plaider en faveur d’une réduction linéaire comme celle défendue par la FEB.
Enfin, dans notre dernier point, nous insisterons sur l’importance d’une politique soutenant la formation initiale et continue, ainsi que la recherche et l’innovation. Par comparaison avec une réduction massive des charges patronales, une telle politique nous semble présenter un triple avantage. Premièrement, elle est susceptible d’influencer positivement non seulement l’emploi, mais également la productivité moyenne du travail. Deuxièmement, à l’inverse de réductions ciblées sur les moins qualifiés, elle ne risque pas de freiner la nécessaire évolution vers une économie de la connaissance. Troisièmement, elle ne fragiliserait pas le financement de la sécurité sociale qui repose prioritairement sur les cotisations sociales.
Dans notre conclusion, nous estimerons par conséquent qu’une réduction des cotisations patronales ne constitue pas une politique en soi. Leur mérite éventuel doit être évalué à l’aune ou à l’aube des objectifs d’une politique structurelle axée sur la formation, la recherche et l’innovation. Ce n’est que dans la mesure où de telles réductions contribuent à la réalisation de ces objectifs – au minimum, en permettant de rencontrer des impératifs de court terme dans l’attente des effets d’une politique davantage structurelle – qu’elles peuvent être justifiées. Il ne peut donc être question d’y consacrer l’essentiel des efforts publics.

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1 Nous remercions Laurence Jacquet et Henri Sneessens pour leurs commentaires sur une version antérieure de cet article. Il va de soi, toutefois, que le contenu de ce texte n’engage que nous.


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